From 3 roues vers le monde

Recit: Yosemite

Le parc du Yosemite : 15 Septembre – 23 Septembre

Créé en 1890, le Parc national du Yosemite protège 3000 km² d’espace sauvage au cœur de la Sierra Nevada. C’est la vallée de Yosemite qui inspira l’idée de « parc national » et elle fut d’ailleurs la première à en bénéficier, puisque dès 1864, un décret protégeait ses paysages grandioses, fruits d’un long travail d’érosion.
Il y a 3 millions d’années, le refroidissement de la planète donna naissance à des glaciers qui sculptèrent progressivement de nombreuses vallées en U. L’une d’entre elles, la vallée de Yosemite, est nichée au pied de falaises de granit de plus de 2000m de haut. Après la fonte du dernier glacier il y a 10 000 ans, un lac s’installa dans la dépression. Il s’est peu à peu rempli de sédiments et a fini par s’assécher, offrant un sol riche et propice à la végétation. Aujourd’hui, une forêt de chênes et de conifères couvre la vallée, entourée de sommets acérés culminants à plus de 4000m, de dômes de granit dénudés, de falaises et de chutes d’eau vertigineuses. Un paradis pour les randonneurs et les cyclistes!

Jeudi 15 Septembre :

Il est temps pour nous de faire nos adieux à l’agréable ville de San Francisco, ainsi qu’à Nancy et Mike. Comme la plupart des ponts (gigantesques) qui permettent de quitter la péninsule de San Francisco sont interdits aux cyclistes, nos hôtes nous ont conseillé de rejoindre la banlieue en « BART » (équivalent local du RER).

Nous enfourchons donc notre tandem à Pittsburg, la banlieue est, avec le Parc du Yosemite en ligne de mire.
De l’autre côté de la baie, tout à déjà changé. Le paysage est vallonné, très sec et le vent balaye les champs de paille. D’ailleurs, nous n’avons jamais vu autant d’éoliennes !

En avançant dans l’après midi, le vent forcit et nous sommes même contraints de descendre de vélo pour passer quelques couloirs de vent en évitant la chute. Les journées ont bien raccourcie et ce vent nous oblige à trouver un abri pour planter la tente, or nous n’avons vu aucune habitation depuis plusieurs heures. Par chance, à la nuit tombée, nous arrivons proche d’une maison, et Danielle nous laisse nous installer dans son gazon, bien abrités.

Vendredi 16 Septembre :

Nous n’avons pas très bien dormi à cause du vent violent et du lampadaire au dessus de notre tête, et à 7h nous sommes debout, réveillés par les poules autour de notre tente.

Les enfants de Danielle nous préparent un super petit-déjeuner, œuf, jambon, café et toasts. On se régale mais en attendant, ils vont arriver à l’école plus qu’en retard, et ça ne semble gêner personne. Il n’y a rien aux alentours, à part quelques maisons, et l’école est à 30km.

Nous faisons nos aux revoir et repartons en direction de l’est.
Le vent s’est adoucit et nous l’avons dans le dos, parfait ! Nous sommes dans une région agricole et très sèche. Des milliers de vaches broutent l’herbe couleur or et entre deux enclos se trouvent des champs de tomates et autres légumes.
Mais nous sommes aux Etats-Unis, et le procédé d’irrigation des champs n’est pas tout à fait le même qu’en France. C’est tout simplement un petit avion qui rase les champs de long en large et déverse son eau à chaque passage !
A midi nous avons déjà fait 40km et nous nous arrêtons à l’ombre boire un coca bien frais. Les gens du bar sont enchantés par notre périple et nous repartons avec une donation de Sheryl de 20$.
La chaleur est écrasante aujourd’hui. Dans l’après-midi, nous longeons un canal en partie sur une route non revêtue. De chaque côté se trouvent des noyers, amandiers et pommiers à perte de vue.

Après 85km, nous passerons la nuit sous des amandiers, après avoir demandé l’autorisation bien sûr ! Avec en guise de douche, un tuyau d’arrosage et de l’eau bien fraiche !

Samedi 17 Septembre :

Cette fois la nuit à été agréable et calme. Nous roulons toujours vers le parc du Yosemite, mais dévions notre route pour nous rendre à Groveland, vers l’accès Nord du parc. C’est un petit village où des amis de Danielle (chez qui nous avons dormi il y a deux jours) se sont proposés pour nous accueillir.
La journée est très très dure car nous avons 85km à faire, sur des petites routes rugueuses avec un très petit rendement. Mais surtout, nous avons deux cols à passer à 600m et 1000m. Nous pensons à finalement abandonner pour aujourd’hui mais l’espoir d’une bonne maison où nous serons bien accueillis nous réjouit et nous passons le dernier col, à très bonne allure, alors qu’au pied le compteur affiche déjà 73km. Nous nous surprenons nous-mêmes.

A la nuit tombante, nous arrivons enfin à destination, mais…. Personne dans la maison ! GRRRRR ! Mais ce n’est pas grave. Nous avons plein de solutions : un camping à 4km, d’autres maisons où nous pouvons demander. Nous allons quand même à la station service voisine pour nous renseigner, savoir s’ils sont partis longtemps, ou si quelqu’un a leur numéro de téléphone. Bingo, on les appelle, ils nous disent qu’ils ne rentrent que demain mais que leur fils va passer pour nous ouvrir. Nous nous installons donc en attendant, cuisinons quelques pates en prenant notre temps après cette dure journée.
Mais ce n’est pas tout : à 21h le fils arrive, descend de voiture, pour nous dire que la seule chose qu’il peut faire c’est…rien pour résumer et que nous pouvons dormir derrière la station service. Donc pas de maison, pas de douche, pas de toilettes, pas d’eau… Il est trop tard pour tout remballer et repartir ! Merci l’accueil et merci le détour.

Dimanche 18 Septembre :

Aujourd’hui nous partons mais sans grande motivation car nous sommes épuisés par la journée d’hier. Nos jambes sont endolories. Nous trouvons le wifi au point info, quelques kilomètres plus loin : c’est une bonne occasion pour prendre un peu de temps et mettre en ligne nos dernières nouvelles. Nous trouvons ensuite une épicerie pour faire quelques provisions et nous finissons dans le premier camping après seulement 6km parcourus, mais en ayant satisfait nos lecteurs!

Lundi 19 Septembre :

Un gros col nous attend pour arriver dans la vallée du Yosemite, nous sommes donc levés à l’aube pour pouvoir en faire le maximum à la fraiche. Alors que nous sommes en train de plier, nous rencontrons Delphine et Christophe, deux français ayant fait un tour du monde il y a deux ans. Ils nous proposent de nous prendre quelques affaires puisque nous allons au même endroit et nous nous débarrassons donc des duvets, matelas et de la tente. La roue tourne !
Nous passons le col à bonne allure après près de 5heures de pédalage difficile. Et entamons la descente, avec une superbe vue sur la vallée et les pics qui l’entourent. Record de vitesse battu : 85,1km/h.

Nous nous arrêtons au pied d’El Capitan, surement une des plus dures falaises au monde pour les férus d’escalade. Ca nous laisse sans voix, c’est époustouflant ! On se demande comment c’est possible de grimper une paroi si raide et si lisse.

Alors que nous scrutons la paroi, nous apercevons quelques points, des alpinistes en train de grimper ! C’est une des choses les plus dingues que nous ayons jamais vu. On nous prête des jumelles et nous pouvons voir quelques grimpeurs, avec leur sac qui pend en contrebas et qu’ils hissent au fur et à mesure de leur ascension. On pourrait rester des heures à les regarder !

Par hasard, Delphine et Christophe, avec qui nous avions rendez-vous une heure plus tard, s’arrêtent et nous en profitons pour récupérer nos affaires. Il n’y a plus aucune place pour se loger dans la vallée et ils doivent donc repartir. Quant à nous, nous espérons que nous allons trouver quelqu’un qui voudra partager son emplacement de camping. C’est chose faite au premier emplacement de camping à qui nous demandons. Cory, qui s’est séparé de sa copine avant de partir en vacances, est ravi de nous accueillir et de ne pas être seul pour ces quelques jours, parfait !

Mardi 20 Septembre :

Nous décidons de profiter du parc national du Yosemite et partons à l’assaut des montagnes.

Pas d’escalade pour nous mais une belle randonnée d’une dizaine de kilomètres qui nous emmène, après 1000m d’ascension, au Glacier Point, d’où nous avons une vue magnifique sur Half Dome et sur la vallée. C’est la haut !

Alors que nous sommes à 100m du sommet, nous voyons un énorme ours noir sur notre droite, en train de manger. Nous l’observons pendant un bon quart d’heure, tout en restant à distance raisonnable car nous avons de la nourriture sur nous. Nous le voyons se gratter le ventre et les pattes contre un tronc, c’est vraiment comique.

Puis ce sont trois cerfs qui arrivent du côté opposé. Nous sommes bien entourés !
Nous profitons de la lumière du soir sur les montagnes, puis nous redescendons en voiture avec deux français rencontrés là-haut. Ils nous déposent au pied d’El Capitan et nous pouvons voir sur la falaise les premières lampes frontales qui s’allument, celles des alpinistes qui vont passer la nuit là… c’est vraiment impressionnant !

Il est temps de revenir à la réalité, nous attendions une navette mais apparemment il n’y en a plus ! Nous partons à pied dans la nuit en direction du camping, à 6km de là. Alors que nous faisons du stop, une voiture s’arrête et nous montons sur un énorme tas de cordes et de mousquetons. Cet alpiniste vient tout juste de terminer son ascension d’El Capitan, après 7 jours passés sur la falaise, c’est incroyable. C’est là 58ème fois qu’il fait l’ascension, et il y a une centaine de voies praticables au total. Son record étant de 17h et la durée maximum étant de 15 jours, soit 14 nuit pendu au dessus du vide dans un portaledge ! Dingue !
Il nous dépose au Yosemite village et de là nous prenons une navette qui nous conduit au camping. Nous arrivons à temps pour un petit barbecue avec Cory, saucisses et épis de maïs grillés.

Mercredi 21 Septembre :

La nuit a été interrompue par une intrusion clandestine dans la tente. Surement un raton laveur. Il nous pique une casquette de vélo et un sac avec quelques trucs non comestible : médicaments, sangles de l’appareil photo, et quelques chewing-gums. Mais heureusement l’oreille d’Audrey nous a alertés et nous arrivons à lui faire peur. Il part donc sans son maigre butin et nous ramassons ce qu’il a éparpillé sur le sol. En même temps toute la nourriture est dans la boite à ours, il avait peu de chance de trouver quelque chose.
Nous avons prévu de partir en vélo pour la journée pour voir la cascade du Yosemite, le lac Mirror, ainsi qu’un point de vue sur la vallée situé à une dizaine de kilomètres. Nous décrochons donc la remorque et enlevons les sacoches. C’est là que nous nous rendons compte qu’une nouvelle pièce du porte bagage avant est cassée et que la roue arrière a un gros voile que nous ne pouvons plus régler. Les têtes de rayons ont un mauvais souvenir du Salar d’Uyuni et tombent en lambeau quand on essaye de les resserrer pour régler la roue.
A la place du programme prévu, et après de nombreux aller-retour dans toute la vallée à la recherche de quelqu’un voulant bien nous aider (tout ici est réservé aux complexes hôteliers et aux vélos de location), nous allons au garage faire souder la pièce du porte bagage avant. Puis le technicien de l’atelier du loueur de vélo accepte de nous laisser utiliser tous ces outils et nous changeons toutes les têtes de rayons et reprenons notre roue.
Tout se termine bien : on nous fait la soudure gratuitement et le mécano des vélos nous laisse les clefs de son atelier. Nous finissons à la nuit tombée et rejoignons Cory pour notre dernier repas ensemble.

Jeudi 22 Septembre :

C’est notre dernier jour dans la vallée du Yosemite : Cory repart en Oregon pour la fin des vacances et nous continuons vers l’est. Pour fêter notre dernier jour ensemble, Cory nous invite à un super petit déjeuner. Buffet à volonté et on se régale : café, jus d’orange, œuf et bacon dans un English muffin, pancakes, pain, viennoiseries, salade de fruits, etc… C’est juste super bon et il faut dire que de l’appétit, on en a !!!

Au moment de partir, Cory nous laisse une enveloppe à ouvrir plus tard. Nous sortons donc de la vallée, regardons une dernière fois El Capitan et ses petits points collés sur la falaise, et attaquons le même col qu’il y a trois jours. En sens inverse cette fois : 800m d’ascension en 15km. Nous sommes ravis de voir que nous avançons encore à bon train, et que nous avons réellement progressé ! Nous nous arrêtons pour une petite pause en haut du col et nous en profitons pour ouvrir l’enveloppe. En plus de tout ce que Cory a déjà fait pour nous, il nous sponsorise 75km de plus !! On se dit souvent que les meilleurs souvenirs dépendent plus des rencontres qu’on y a fait que des endroits eux-mêmes. Et le Yosemite restera dans nos mémoires pour longtemps.
Alors que nous nous remettons en selle, nous entendons un hurlement… un coyote est à quelques dizaines de mètres de nous !
La journée n’est pas finie et nous repartons pour un second col de 27km, avec 600m d’ascension, moins dur, mais nos jambes ne sont plus parfaitement fraiches.

Nous arrivons enfin au camping, lessivés, et nous nous rendons compte qu’il est fermé (la saison est finie !). Mais nous n’avons pas le choix, nous resterons là car le prochain est à 15km et ça continue de grimper.
Nous sommes en plein milieu de la forêt et à 7h30, il fait nuit noire. Autant dire que nous ne sommes pas complètement rassurés entre le coyote tout à l’heure, la bête qui est rentrée dans notre tente la nuit dernière et l’ours d’avant-hier !!! Les nuits sont très fraiches maintenant que nous sommes en altitude.

Vendredi 23 Septembre :

La nuit a été parfaitement silencieuse et nous avons bien dormi. Nous ouvrons la boite à ours dans laquelle nous mettons tout ce qui a une odeur pendant la nuit. Nous voyons quelques petites crottes suspicieuses mais rien n’a disparu. Puis de plus en plus de crottes jusqu’à ce qu’on ouvre le sac à dos, et là, c’est le drame, toutes nos réserves de pain et de gâteaux ont été réduites en miettes… et le pire, c’est que la scène de crime est restée intacte.
Nous apercevons une forme qui attire notre attention dans le coin de la boite à ours, et ce n’est autre que le voleur. La souris, qui s’est goinfrée toute la nuit n’a pas pu ressortir par le trou par lequel elle était entrée ! Elle est restée coincée là, la tête en bas, et s’est probablement débattue jusqu’à la fin. Comme quoi, mieux vaut manger raisonnablement !

Tout ça nous a quelque peu coupé l’appétit, et de toute façon on n’a plus grand-chose à manger. Ca tombe bien, le col n’est pas terminé et nous reprenons notre ascension au milieu de la forêt. La pente est bien plus douce qu’hier, et nous profitons d’une belle vue sur la vallée du Yosemite.

Nous nous arrêtons dans la prairie de Tuolumne, avec de beaux paysages et partageons un emplacement de camping pour la nuit avec Pascal et Cathy, deux français en vacances pour quelques semaines.

Demain, nous sortons du Parc du Yosemite, et nous nous dirigerons vers des paysages bien plus désertiques, jusqu’à la vallée de la Mort, où les températures dépassent les 50°C.

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